Histoire de la corne de Cornimont

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Histoire de Cornimont et des Counehais

Extraits les plus intéressants se rapportant à Cornimont empruntés à l'Abbé Didier Laurent par Alphonse Didier

 

"Le nom de Xoulce" ne dit pas clairement du premier coup le sens que lui ont attribué les premiers habitants ou les premiers chasseurs qui ont pénétré dans cette gorge…

Il est fort probable que le teuton était la langue des chasseurs qui escortaient Charlemagne et ses descendants dans leur chasse à l'auroch et à l'ours. Il est certain d'autre part que le plus ancien abri consytruit dans cette vallée sauvage fut un gîte de chasse mentionné dans les anciens titres antérieurs au XVIème siècle parmi les droits domaniaux des Ducs de Lorraine sous le nom de retrait de bois; on sait que sont emplacement était au lieu-dit "à la Croix" au-dessus du Plain de Xoulce où se trouvent aujourd'hui les hangars de M. Mathey, reconstruit sur l'emplacement de l'ancienne habitation. Or maison se traduit en allemand Haus ou House qui est devenu avec la prononciation patoise Hhousse.

En outre cet abri fut probablement compris dans la location des chaumes tenues par les gens de Munster du XVIIIème au XIXème siècles, et pouvant servir aux troupeaux qui paissaient sur les répandises de Peterhutte et du Grand Ventron. Notez que ce terme de Ventron est le nom francisé de Winterhung qui signifie hivernage et rappelle aussi une création des tenanciers des chaumes.

Le nom de Xoulce rappellerait donc la maison primitive, l'abri qui fut élevé dans ces forêts ; Dieu sait quand. Cornimont n'ayant pas de centre, était déjà connu de Ferri III Duc de Lorraine en 1285 lorsqu'il parle de La Bresse, où il dispose de la moitié du fief, dit que ce village est situé de l'autre côté de Cornimont; donc ce nom est déjà bien antérieur à 1285, et sa dénomination se rapprocherait de celle laissée par le don ou la trouvaille d'une troupe laissée ou perdue par un homme de Charlemagne, et qui servait autrefois à convoquer le Plaid (assemblée communale) du haut de la Roche di Counou au Daval, derrière la Croix des Plaids, roche enlevée par le propriétaire voisin pour y établir son garage, en face chez Nauroy et dominant le passage de Humbert, l'hôtelier, par lequel il accède à la rivière.

(Au pied de cette roche étaient posés des sièges en Pierre en demi-cercle, la croix qui est encore là fut élevée en 1623, dite La Croix des Plaids - un tilleul énorme ombrageait cette place; devenu creux, il fut vendu en 1830 à Jean Aubert).

En ce temps là, le cerf, le sanglier , l'ours étaient assez communs sur les deux versants des Vosges. En 1624, un habitant de Saulxures capture deux oursons, et après six semaines, les fait parvenir au Duc de Lorraine. En 1709, un solitaire fut tué dans les forêts de Bussang.

En 1740 et 1755, deux autres furent tués dans le Boerenthal sous la Schlucht et le curé de Munster dans une chronique de 1755 affirmait qu'on avait abattu six ou sept ours dans les trente dernières années. En 1620, les nobles de Fougerolles, seigneurs de Cornimont, durent requérir des chasseurs pour déloger une famille d'ours qui s'était emparée des souterrains du château. Un peu plus tôt, en 1607, les habitants de Gérardmer avaient demandé au Duc de Lorraine le maintien de leurs anciens droits de chasse pour l'ours et le loup qui décimaient leurs troupeaux sur les hauts pâturages.

Dans les siècles antérieurs, l'auroch blessé par le chasseur était aussi redoutable avec ses deux cornes puissantes, farouche, impétueux à la course, doué d'une force fantastique, c'était même pour l'ours un ennemi redoutable.

Des bandes de loup à ces moments là étaient assez communes. Les chroniques ne nous donnent d'autres espèces d'oiseaux que celles d'aujourd'hui : l'autour, le milan, la buse, l'épervier et nos rivières étaient infestées de loutres. On trouve encore le passage de chasseurs d'auroch qui stationnaient dans les forteresses du Mont Habart (Saint-Mont) et au châteu Moselle au dessus de Bussang, allant d'une vallée à l'autre, franchissaient le Travexin qui est l'ancien nom du passage de Fenesse.

Après les difficultés qui surgirent entre le Duc Thierry et l'Abbaye de Remiremont, Cornimont et Xoulce appartinrent administrativement au Ban de Vagney.

La redevance substituée à celle des fromages était de trois sols et 9 écuelles, elle révèle le commencement de l'industrie de la vaisselle en bois de hêtre. L'ouvrier qui fabriquait cette vaisselle s'appelait le Vaxelaire, ou Vaisselaire, faiseur de vaisselle ou vaisseaux. Ce nom de Vaixel se prononçant en langue du pays Wouahhé, il est resté usité pour désigner le vaisseau de bois (cercueil) notre dernière demeure comme celui de l'ouvrier est devenu un nom de famille.

La foresterie du Ban de Vagney (terrain en essarts et forêts) avait son siège de justice à Vagney dans une maison qui s'appelait le Franc Chazeaux, mais ses sujets étaient repandus en différents endroits du ban, dans la vallée de Rochesson, et il est probable que ce furent ces forestiers qui formèrent à l'origine les seigneuries de La Bresse, Cornimont et Ventron, qui furent concédées ensuite à des familles nobles et puissantes. C'est cette division en essarts qui a donné lieu aux noms suivants Xard, Hiez.

On ne saurait déterminer l'époque de la formation de la seigneurie de Fougerolles par un membre ou allié de la famille de Faucogney; mais des documents rattachent, de temps immémorial, Cornimont et Xoulce à cette seigneurie dont la suzeraineté fut si souvent contestée entre les états du Conté de Bourgogne, du Duché de Lorraine et du Conté de Bar.

Aucun acte des aubises Lorrains ne rapporte comme pour La Bresse et divers points du Ban de Vagney, l'attribution à un seigneur du domaine de Cornimont. Retiré à l'Abbaye de Remiremont, on suppose que son annexion à cette seigneurie fut un fait acquis lorsque Ferri III donna en fief la moitié de La Bresse aux Hattstatt. En tout cas, dès le XIIème siècle, on constate qu'ils sont apparentés aux plus illustres et antiques familles de Lorraine, comme il convenait d'ailleurs à la puissante race des Faucogney.

Comme redevances seigneuriales, il y avait d'abord la taille, variable selon le nombre et l'aisance des sujets; elle se payait en deux termes à Cornimont

Ils devaient en outre 4 pintes d'huile tous les ans (le lundi après les Brandons), 4 pintes de beurre annuellement ( le premier jour de Mai) et 4 pintes de poisson le jour de la Toussaint. Toutes ces taxes rendues au Château de Fougerolles sous peine de trois mois d'amende. En outre, chaque feu au ménage devait encore une géline (poule) à la Saint-Martin; notons que ces commissionnaires étaient bien restaurés et retribués de leur peine par le chatelain.

Il n'est pas improbable que le fougueux Jean du Châtelet, voué du Val de Vagney, constitue le point historique de transition par où la petite seigneurie de Cornimont a passé de Faucogney à Fougerolles. On sait d'après les généalogistes que les deux familles du Chateley et de Faucogney prirent alliance dès le XIIIème siècle avec la maison de Joinville, la tante de Jean du Châtelet était la sœur de l'historien de Saint-Louis. Héloïse de Joinville avait epousé Jean Ier de Faucogney; elle était née d'Alix de Joinville épouse de Geoffroy de Faucogney. On a connaissance d'un acte de vente de 1303, qui fit passer à Charles de Valois et Catherine de Courtenay sa femme, ce que Jean du Châtelet et sa femme avaient à Fougerolles.

D'après ces circonstances, il est probable que dans le cours du XIIème siècle un même possesseur, un Du Châtelet, a réuni les droits seigneuriaux de Fougerolles et de Cornimont, tenant déjà le second de ses alliances avec les Faucogney et d'une succession ducale.

Selon toute vraisemblance, il y avait des curés ou des chapelains à Saulxures depuis un assez long temps, quand le premier connu apparut dans un titre particulier en juillet 1312. A cette date, Ancel ou Anselme, curé de Saulxures, Cornimont et dépendances reconnut par un acte authentique que les dames du chapitre avaient les deux tiers des grosses et menues dîmes de sa paroisse, et lui, l'autre tiers; ce curé par testament fit don à l'église des héritages qu'il possédait dans les paroisses de Saint-Amé, Vagney et Saulxures, ce curé était donc originaire de la région.

Les cultures y étaient déjà assez étendues, pour que le tiers des dîmes lui suffisent pour son entretien. Il n’était pas encore question de Ventron, ni de Xoulce, n’ayant encore ni église ni chapelle. Cornimont y avait déjà le titre d’annexe dès le XVIème siècle.

Il s’en suivrait que la chapelle du Sauloy, dont nous savons qu’elle avait près de 200 ans, fut remplacée par une église en 1704. Saint-Prix patron de la paroisse de Saulxures passa sa jeunesse chez les bénédictins de Murbach et fit ensuite séjour à Saint-Amarin où son culte et celui de ses reliques furent pratiquées et c’est à Saint-Amarin qu’en 1684 le curé et les notables de Saulxures allaient chercher des reliques de Saint-Prix leur patron.

En 1344, Conrad de Hattstadtt reconnut par lettre authentique, qu’il tenait du Duc Raoul 10 livrées de terre de fort, à réachapt de cent livres de fort, à prendre sur la pâture, les vaiches et les revenus de bois que le duc a entre Longemer et le pertuis d'Estage ( Haut de Bussang). Ce prêt englobait toutes nos hauteurs entre La Bresse et Ventron.

A la même époque, Cornimont est énuméré avec le quart du château et de la seigneurerie de Fougerolles, dans une reprise d'hommage du 5 février 1344, Vuillaume de Fougerolles, dernier détenteur de ces fiefs, étant mort depuis un certain nombre d'années, laissant son fils Huguenin sous la tutelle de son frère Jean. Pour des raisons inconnues, le duc Raoul avait fait de la ville, du château, et des appartenances de Fougerolles, un gage hypothécaire d'un prêt de 400 livres à lui consenti par Jean de Gondreville, chevalier. Le tuteur de Huguenin avait la majorité de ce dernier, dégagea ses biens, devenu majeur, fit sa déclaration d'homme à la date précitée en comprenant Cornimont nommément dans cette reprise sur le territoire duquel se trouve l'emplacement de la chaume de Peterhutte, de celle d'Altenberg (vieille montagne) et d'une partie de celle du Grand Ventron.

Reprenons la suite des Ordonnances : toutes les seigneureries doivent se rendre à l'appel, quand il y a cré aux armes, quelle que soit l'heure.Quand Monseigneur le Duc tient armée et commande en personne, le maire du grand ban doit fournir un char attelé de six bœufs ou de deux chevaux. L'Eglise paroisse de Vagney et celle de Saulxures doivent fournir chacune par moitié un char conduit par deux bouviers avec un charpentier muni d'une terière et d'une hache.

Le maire doit à Monseigneur le Duc huit sergents conduits par lui ou par un remplaçant capable. Il y a cinq franc-sergents au compte de la mairie et trois de réserve au Ban – il n’est dû par chacun que cinq sols, une fois l’an onwayen (automne) dont moitié à Saint Pierre et l’autre au Duc – ils doivent porter la bannière en cas d’alerte ou de chevauchées (courtes expéditions pour un coup de main).

Ceux de Cornimont doivent fournir un sergent pour la garde (la waite) au château d’Arches le pain au sac et en chevauchées. En plus, l’Eglise (paroisse) de Saulxures doit deux sergents au château d’Arches et quatre en chevauchée – si la convocation n’est pas pour Arches, les églises de Vagney et Saulxures ne sont pas tenues de fournir les sergents à la chevauchée.

La foresterie de Rochesson en doit deux.

Les dames Villame (probablement Ventron) en doivent un pour la chevauchée. Ventron faisait partie du domaine de quelques damesde la famille de Faucogney. A l’extinction de ce rameau, cette seigneurerie fut de retour à la Maison d’Esly ou d’Esley, elle même éteinte au XVème siècle pour passer à celle de Porcelets de Maillane.

Les chars et les sergents vont jusqu’à Arches ou Bruyères aux frais du ban, au delà, c’est aux dépens de Monsieur le Duc.

En police, le prévot et Monsieur le Duc ou ses sergents ne peuvent prendre un sujet du ban en fait flagrant ou sur plainte déposée, mais le remettre à la Ière justice qu’ils rencontreront et qui le jugera avec les prudhommes selon le droit et son fait.

Quand le souverain eut peu à peu réussi à faire subir sa suzeraineté exclusive dans les Hautes-Vosges en y créant des villes neuves, comme Gérardmer et La Bresse (dont la seigneurerie fut d’abord concédée aux nobles alsaciens de St Amarin et de Hattstadtt) ou des fiefs comme Cornimont et Ventron, laissés aux Faucogney et plus tard à différents titulaires, l’indivision fut une source de conflits qui se sont prolongés jusqu’à la Révolution française.

Si aux XIVème, Xvème et XVIème siècles, nous voyons trois gîtes de chaumes attribués plus tard au territoire de Cornimont, c’est que ces pâturages étaient éloignés de la zone d’actiondes marcaires Munstériens. Les amodiateurs des belles chaumes de La Bresse pourront faire entrer la Vieille-Montagne dans leur bail avec le Rottenbach ; les habitants de Ventron en feront autant pour le Grand Ventron cornimontais qui longe le pâturage ventronais. Et Peterhutte qui finira par ne plus être exploité redeviendra forêt.. Cet isolant de nos chaumes à ce moment-là, invitait des colonies de réfugiés fuyant le voisinage des centres et lieux fortifiés et cherchant une vie tranquille loin des passages de troupe.

 

 

Page en travaux le 23 février 1999 - Suite en cours

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